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Ces engrais insolites issus de l’économie circulaire

La tendance du retour au sol des matières organiques se confirme. De nouveaux procédés de traitement des déchets et de la biomasse font surface, de nouveaux intrants émergent. Reste à s’assurer de leur efficacité et leur innocuité.

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«Algues, biochars, mais aussi frass, struvite et même urine humaine seront peut-être les intrants incontournables de l’agriculture de demain. Ils rejoindront ainsi les composts, digestats, effluents d’élevage, biodéchets, boues et autres engrais et amendements organiques historiques, qui eux aussi resteront incontournables, car ils ne cessent de nous révéler leurs atouts et sont sans arrêt revisités par les nouvelles technologies. » Le think-tank Adebiotech, spécialisé dans les biotechnologies, avait fait fort pour attirer le chaland lors de son colloque sur les intrants durables au service des sols, le 14 mai dernier, à la Biocitech de Romainville (Seine-Saint-Denis). Mais les faits sont là : « Les engrais minéraux sont des ressources non durables, ils sont fabriqués à partir de matières premières finies, et consomment beaucoup d’énergie, appuie Sabine Houot, directrice de recherche à l’Inra, spécialiste des produits résiduaires organiques, du compostage et des matières organiques. Et il faut chercher à leur substituer d’autres intrants plus durables. »

L’Europe salvatrice

Encore faut-il que ces derniers soient autorisés à être épandus. Ces engrais du futur ne sont pas autorisés de facto. Il faut, pour les metteurs en marché, soit élaborer des normes, soit passer par la case Anses. En revanche, la nouvelle réglementation européenne, qui va entrer en vigueur en mai 2022, va pouvoir débloquer nombre de situations puisque l’introduction de nouvelles matières telles que la struvite, les biochars ou les cendres est déjà envisagée.

« Le contexte est tout à fait favorable au développement de ces nouveaux intrants issus du recyclage », explique Sabine Houot. Et de citer le développement de la bioéconomie, la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2016, la loi EGalim, l’initiative « 4 pour 1 000 » de 2015, ou le « très fort développement de la méthanisation » grâce au plan EMAA de 2013 et aux évolutions réglementaires pour faciliter la valorisation des digestats agricoles.

Besoin d’indicateurs

Mais Sabine Houot insiste sur la nécessité d’indicateurs pour évaluer ces nouveaux intrants et de méthodes pour piloter leurs apports. « Comment quantifier l’efficacité de ces pratiques de retour au sol des matières organiques ? Comment assurer que cette valorisation d’intrants en agriculture est faite sans dégrader la qualité de l’eau, de l’air et des agrosystèmes, notamment si on fait des épandages répétés ? »

« Il y a encore peu d’éléments aujourd’hui disponibles pour évaluer l’impact sur l’abondance, l’activité et la diversité des organismes du sol, les processus et fonctions associées et les services rendus, reconnaît Matthieu Valé, responsable du pôle technique du laboratoire Auréa AgroSciences. La meilleure prise en compte de cette composante biologique à l’avenir permettra aussi de mieux évaluer l’impact de cette diversité croissante d’intrants et de mettre au jour des outils pour choisir le bon intrant selon le contexte terrain et le service recherché. »

Renaud Fourreaux

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